La rencontre entre Jean L'Anselme et la Nouvelle
Revue Moderne est
née et s'est poursuivie sous le signe de l'amitié.
En 2000, je l'avais contacté une première fois
après avoir lu un de ses textes dans L'Igloo
dans la dune de Guy Ferdinande. Puis nous nous sommes
rencontrés en février 2001 au Théâtre
"Le Biplan", à "Wazemmes,
au cours d'une soirée organisée par l'association
"L'Antre à souffle". Le comédien François
Marzynski y présentait, une "lecture-spectacle de
poésie contemporaine" avec des textes de Jean L'Anselme,
En tant que Roi des Cons je pense finir Empereur. J'ai
beaucoup ri au cours de cette soirée. Le peintre bruxellois
Philippe G. Brahy, qui venait d'éditer dans sa revue
Dixformes-Informes un mini fac-similé de "Peuple
et poésie", en profita pour adresser à
Jean un éloge aussi drôle qu'émouvant. Quant
à notre futur empereur, en pédagogue malicieux
qu'il n'avait pas cessé d'être, il n'hésita
pas malgré l'heure tardive à nous donner une leçon
d'histoire de l'humour qui fut fort appréciée.
Lors de la création de
la Nouvelle
Revue Moderne,
c'est tout naturellement que j'ai écrit à Jean,
qui ne s'est pas fait prier pour m'envoyer des textes inédits
et apporter son soutien à la revue dont il fut un des
premiers et fidèles abonnés. Il a aussi donné
des poèmes à Roxane, alors âgée de
douze ans, pour sa première revue, La
Petite fleur sauvage.
Il m'avait adressé
une petite bio que je ne peux relire sans émotion :
"Jean L'Anselme est né
curieusement un 31 décembre à minuit, tout à
fait par hasard près d'Amiens, en 1919 (
). Il est
aussi fier d'être picard qu'un buf est fier d'être
bourguignon.
Il eut pour tâche, pendant
40 ans, de défendre la culture française dans
un Ministère alors que, paradoxalement, le peintre Dubuffet,
qu'il connut très tôt, dénonçait
de son côté "l'asphyxiante culture".
Dans son sillage, il guerroya alors toute sa vie contre ceux
qui en "intoxiquaient" la littérature.
Par antithèse et par
moquerie, il arriva à prendre des positions aussi impertinentes
et suicidaires que "Plus ils seront intelligents, plus
je serai bête" et, à l'instar de Dada et Dubuffet,
il réhabilita le laid ! "C'est avec le laid que
je ferai maintenant mon beurre".
Il a publié plus de
40 ouvrages, principalement de poésie, un essai sur l'humour,
des albums pour la jeunesse, des chansons. (
) "Il
est buté, têtu et bourré d'idées
fixes au risque de passer pour un imbécile puisqu'il
n'en change jamais."
La collaboration de Jean lui-même
et les contributions de François Huglo, Jean-Louis Lanoux
et Philippe G. Brahy ont rendu possible l'édition d'un
numéro spécial de la NRM,
aujourd'hui épuisé, que j'ai illustré de
mes collages [La NRM Hors-série
n° 2- Décembre 2002 : "Jean
L'Anselme Vive la poésie"].
À
l'occasion de sa sortie, grâce à l'enthousiasme
de Didier Deroeux, animateur de la librairie Solstices à
Lille, nous avions organisé une lecture
avec lui (les photos qui illustrent la page Jean L'Anselme
sur notre site ont été prises lors de cette rencontre).
Didier Deroeux avait réuni une jolie collection de livres
anciens et récents de Jean L'Anselme qui se sont vendus
comme du bon pain.
Une véritable amitié
s'est nouée entre nous et Jean, au fil des ans, a continué
à m'envoyer des textes, régulièrement publiés
dans la NRM. Certains ont été
réunis avec d'autres dans Ça
ne casse pas trois pattes à un canard et après
? (2004) et Con
comme la lune (2008), ses derniers livres parus aux
éditions Rougerie. En attendant, peut-être ? le
recueil de "soldes avant liquidation" qu'un de ses
courriers m'annonçait en 2011. À chaque envoi
de la revue, il prenait la peine d'écrire une petite
lettre, pour dire ce qu'il avait aimé et pour renouveler
ses encouragements à nos explorations lunaires.
Ainsi, le 2 janvier 2011 :
"Cher
Philippe,
Merci pour tes vux et d'avoir fêté
mon anniversaire généreusement en me publiant.
Si je regarde dans mon rétroviseur, je constate
que la "Nouvelle Revue
Moderne" a été ma meilleure terre d'accueil
pour mes "pensées".
Je te souhaite longue route sur ce chemin de plus en plus
difficile. L'écrit bat de l'aile, la communication
change et bouscule les échanges. Cela commence
à se dire.
Mon âge avance et bouscule aussi ma santé.
Je suis, m'a dit le Docteur, en bon chemin. Mais plus
tout à fait comme avant. Tout le monde passe par
là, soyons docile. Je viens de finir un livre dont
le titre te dira ce que je rumine :
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"Liquidation
des stocks avant fermeture"
(poésie au rabais - Soldes 30, 40, 50%)
|
Je
brade. Vive la brocante. |
Je
t'embrasse
Jean"
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Jean L'Anselme avait une véritable
envie de communiquer le bonheur qu'il trouvait dans la poésie.
En dépit des apparences, la voie qu'il a choisie, celle
de l'humour grinçant et de la "bêtise"
revendiquée n'était pas la plus facile. C'était
son idée d'une poésie naturelle qu'il aimait partager
avec "l'homme du commun" pour lequel il avait le plus
grand respect.
Quel meilleur hommage rendre à
Jean L'Anselme que de continuer à le lire et de sourire
encore avec lui ?
Philippe
Lemaire
phil.fax@free.fr
Janvier 2012
La
NRM
n°29 - Printemps
2012
LIQUIDATION
DES STOCKS AVANT FERMETURE
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Ce
livre, dont Jean L'Anselme avait souhaité
la publication posthume, paraîtra en juin
2012. Il est proposé en souscription au
prix de 13 euros pour un exemplaire de
l'édition courante et de 19 euros pour
un des 50 exemplaires sur Lana (chèque
à l'ordre des éditions Rougerie).
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Éditions
ROUGERIE - 7 rue de l'Echauguette - 87330 MORTEMART
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