Printemps 2013

 

12EME ANNEE N°32

 

Coins si denses

     Ce numéro de printemps de la Nouvelle Revue Moderne fait la part belle aux coïncidences, ces conjonctions si troublantes que nous avons du mal à démêler si elles sont dues au hasard ou au regard que nous portons sur elles. C'est le texte de Robert Rapilly "Coins si denses 0 à 13" qui m'a donné envie de faire jouer un peu plus fort cette "petite musique du hasard". Jacques Jouet m'a proposé une "Lettre de Julio Cortazar" que peut-être l'auteur de Cronopes et fameux n'aurait pas reniée, tant elle témoigne d'une connaissance sensible de son approche de la création. Lucien Suel m'a confié deux textes qui illustrent à merveille son approche personnelle des contraintes d'écriture, "Nuage" et "Les phalanges boueuses". Coraline Soulier a préféré s'interroger sur les liens possibles entre contrainte et coïncidence. J'ai choisi pour ma part de rendre compte de quelques "moments de doute".

     La chronique de Marie Groëtte est consacrée à Henry Bauchau autour de la "circonstance éclatante" retrouvée dans les profondeurs de l'enfance de l'écrivain et psychanalyste disparu en septembre dernier. "Que serions-nous sans les mots ?" se demande Géraldine Serbourdin dans un texte écrit à partir d'un collage. Elle secoue les images comme on secoue un texte au théâtre. Parvenu juste avant le bouclage, un poème de Pierre Dhainaut semble lui répondre en écho : "ne te fie qu'aux lèvres". Enfin, j'ai inséré un hommage à l'œuvre très singulière de Marie Noël Döby, écrit à l'occasion de la première grande exposition de ses collages, dessins et poupées fantastiques à la galerie de l'Usine à Paris.

     Des collages de ma composition sont dispersés au long de ces pages. Ils permettent de faire un voyage à travers les images comme parmi les mots - en s'en approchant ou en s'en écartant. On peut même retourner la revue ; on voyagera encore. "Interrupteur", un très court poème de Flanjou (Francis Carpentier), est placé en dernière page de ce numéro. Il ne comporte que quatre mots et est très simple d'utilisation. On peut l'emporter avec soi et l'allumer ou l'éteindre comme tous ces appareils dont nous ne pouvons plus nous passer.

PHILIPPE LEMAIRE
(phil.fax@free.fr)