Création-récréation

 

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Janvier 2007
Rire parmi les hirondelles

- Alfonso JIMENEZ : Rire parmi les hirondelles (illustrations de Kelig HAYEL) Réalisé par Plein Chant, ce recueil de toute beauté reprend une petite quarantaine de fables autrefois publiées par Guy Chambelland et devenues introuvables. L'humour de notre ami Alfonso et les dessins de Kelig Hayel s'accordent à merveille. A offrir et à s'offrir absolument !

 
La Bibliothèque Oulipienne

BO n°149 (Juin 2006) Jacques ROUBAUD et Olivier SALON : Nouvelles sollicitudes "Ô bonheur, ô joie, ô fortune amie, le catalogue de la Bibliothèque Oulipienne vient de s'enrichir d'une nouveauté..." La BO 149, signée Jean Roubaud et Olivier Salon reprend une idée de Franc-Nohain, déjà utilisée par Serge Gainsbourg, mais jamais exploitée de façon systématique. En introduction à ces Nouvelles sollicitudes, les Professeurs Octavius J. Carley, de l'Université de Saint-Andrews à Lochgelly (Ecosse) et Icosus Labru, de l'Université Universelle (Paris) tentent la théorisation de cette forme poétique où le dernier vers, homophone d'un substantif concret, lance une interrogation sur une personne dont le nom n'est pas un nom connu.

  Ils sont des centaines de mille
Lecteurs de Nothomb ou d'Angot
Leurs romans, on en cause en ville
Dans Le Monde ou Le Figaro.
Mais qui lit Mandjaro ?
Génial, non ? Pas convaincu ?
  Le monde est beau, la vie est belle
Écarte ta mèche rebelle,
Ris, Bambelle !

 




 

 

  • La Bibliothèque Oulipienne n°149 Juin 2006 (6 €). www.oulipo.net
 

- BO n°151 (septembre 2006) Paul FOURNEL : Romans Cet "exercice de style" à la manière de Queneau nous conte une même histoire (amour et drame !) du point de vue de chacun des personnages : l'amoureux, la petite femme facile dont il s'est épris, la concierge, le perroquet, l'enfant caché, etc. Autant de chapitres qui s'enchaînent, s'emboîtent, se complètent, et entraînent le lecteur dans un kaléidoscope de romans de plus en plus délirants. Subtil, brillant et drôle.

La Bibliothèque Oulipienne n°151 (6 €). www.oulipo.net

 
Poésies et théories

- Contre-allées n°19-20 (automne-hiver 2006) : Aux côtés d'Amandine Marembert et Romain Fustier, Valérie Rouzeau, Christian Degoutte, Thierry le Pennec et S.G. Lucas empruntent ces contre-allées avant de se donner rendez-vous pour une lecture de poésie au jardin, à Montluçon en juin prochain.

 

- Diérèse n°34 (automne 2006) : Il est toujours difficile de rendre compte de la richesse de Diérèse, tant la revue de Daniel Martinez - 260 pages pour ce numéro - offre abondance de bonnes lectures. C'est une "nouvelle nouvelle" NRF où les poésies du monde côtoient les dernières productions d'un terreau poétique francophone toujours fertile. Je suis de ceux qui regrettent l'interruption de la publication des lettres de Jean Rousselot à François Huglo, mais je suis heureux de retrouver la signature de celui-ci dans ce numéro.

  • Daniel Martinez 8, avenue Hoche 77330 Ozoir-la-Ferrière (10,76 € port compris, ou 35€ pour 4 numéros).
 

- Doc(k)s n°1/2/3/4 quatrième série " Entre deux siècles " Poésie(s) Théorie(s) + film DVD Rom (août 2006) : Docks, c'est une somme d'un bon kilo, un fourre-tout livré dans un beau désordre… Il manque un peu marges et de respiration à ce pavé de 450 pages. A découvrir, le dossier complet sur l'artiste fêlé qui a voulu inscrire son nom aux frontons de l'art contemporain en pétant à coups de marteau une réplique de l'urinoir de Duchamp. Pour le fun, il faut lire la lettre de lamentations hypocrite et imbécile de la conservatrice sur "l'Œuvre" irrémédiablement détériorée.

 

- Libelle n°173 (novembre 2006) : Perfor-mance : ce mince mensuel de poésie parvient à publier 11 auteurs sur 6 pages en A5.

  • Libelle 116 rue Pelleport 75020 Paris (2€ ou 25€ pour un an).

 
 Revues du Nord de la France

- Rétroviseur n°104 (été 2006) "Des mots et des hommes" : Une des plus anciennes revues de poésie du Nord porte sa pagination à 70 pages, tout en réduisant sa parution afin de faire face à l'augmentation des tarifs de la Poste. Beaucoup de bonnes lectures, dont un dossier consacré à Alin Anseeuw, poète et éditeur obstiné qui fête les 30 ans d'Ecbolade, 130 titres publiés en typo depuis 1976 et un dernier éditorial de Bernard Desmaretz, brusquement décédé en cette fin d'année 2006.

  • Rétroviseur - Diverses adresses aux noms de poètes, dont le 23 rue Jacques Prévert à Orchies et le 240 rue Victor Hugo à Noyelles sous Lens (7,50 € ou 22€ pour 3 numéros).
 

- Comme un terrier dans l'Igloo n°91 (décembre 2006) : Détour par Bisteron, village imaginaire de Michel Ohl, pour ce dernier numéro de l'année 2006 qui pourrait aussi être le dernier avant un petit moment. Je suis imperméable à la poésie de Michel Ohl, mais j'ai aimé ici la mise en page sophistiquée, la chronique inactuelle sur le Dürer de John Berger, la photo-souvenir du concert magique des Zombies à Harelbeke, le 14 novembre dernier, et les dernières nouvelles de notre ami Frank Vanhauwaert qui file le parfait amour du côté de Chaiyaphum, au Nord-est de la Thaïlande. J'y cueille au passage cette information capitale : "Le paradis terrestre ne s'est jamais situé dans un pays judéo-chrétien : il se trouve ici et il n'a jamais disparu."

 

- L'Enfance n°4 (Novembre 2006) Ce nouveau numéro de la revue créée par Ivar Ch'Vavar et Claire Ceira est à la fois austère, parfaitement cohérent et très divers. L'enfance en est le fil directeur, non seulement parce qu'on y trouve un dessin et un poème d'enfant (Gwendoline, 11 ans), mais parce que les poètes qui s'expriment ici restent profondément attachés à la nostalgie de cette période de la vie, à la capacité d'émerveillement qu'elle recèle, à son fond de tendresse, de confusion, de douleur parfois quand un coin du voile qui cache les réalités du monde adulte se déchire. Parmi les textes les plus sensibles, je citerai ceux de Jean-Louis Rambour, Michel Gerbal, Jean-Paul Gavard Perret, Ivar Ch'Vavar, Claire Ceira, Christian Edziré Desquesnes et Pascal Lenoir. J'ai été très intrigué par un texte simplement signé Ariane, Quelques lumières éteintes dans l'avant-nuit. Il m'a donné l'impression que procurerait une page imprimée déconstruite, dont on aurait retiré la plupart des mots. Le cahier joint, Carnet aphasique, de Pascal Leray, se présente comme une sorte de journal sans date, mêlant poèmes, notes intimes et fragments de livres inachevés. Dans les œuvres intimes, quelques mots suffisent parfois à gratifier le lecteur : "Déchirement. Avec l'âge, la conscience s'accroît. Donc, le déchirement. Se départir du temps de son enfance est une entreprise faramineuse et qui coûte plus qu'elle n'apporte de joie ou de réconfort. Pourtant, dans le déchirement, sans le nier, sans chercher à le perdre de vue, se noue un nouveau pacte. La vie comme un défi. La vie à elle-même opposée. (…) Une révolte, mais une révolte secrète. Certains croient au pouvoir, d'autres non. Aux premiers, ne dites surtout pas ce qu'il en est. Le pouvoir ? Mais ils en ont besoin comme un enfant de son biberon ou de sa tétine. L'anarchie, ce n'est pas - je ne crois pas - un dogme : c'est un des constituants essentiels de la vie psychique, dans sa dimension sociale. Sans laquelle nous serions des automates. Nous jouons et nos rôles sont plus ou moins instables. Bien malheureux qui croit à la réalité du rôle qu'il joue !"

  • Claire Cassagne - 64 rue Gaulthier de Rumilly 80000 Amiens (10 € pour 2 numéros).
 

- La Vie secrète des mots n°4 (octobre 2006) Deux mini-recueils composent ce quatrième numéro de La Vie secrète des mots : Fin et pourquoi pas ? de Didier Trumeau et Vingt-deux syncopes de Paris, de Bruno Sourdin. Cette revue créée en début d'année clôture ainsi 2006 en ajoutant deux nouveaux fleurons à un florilège déjà impressionnant.

  • Pascal Lenoir - 11, ruelle de Champagne 60680 Grandfresnoy (10 € pour 4 numéros).
 

- Passages n°1 (hiver 2006) Dans le sillage de Tousnosjourssontunpoème, une lettre dispersée aux quatre vents, Christian Edziré Desquennes lance Passages, une revue qu'il entend placer sous les inspirations croisées d'Arthur Rimbaud, Ivar Ch'Vavar et James Osterberg (Iggy Pop). Un musicien qui déclare : "Si vous voulez créer un art puissant, il vous faudra abandonner le côté sage de l'existence" ne peut être un simple produit du music business. Faut-il voir en lui une réincarnation du Comte de Lautréamont ? Ses chansons et prestations scéniques, avec ou sans les Stooges, n'interdisent pas cette interprétation. "La providence fait quelquefois reparaître le même homme à travers plusieurs siècles", notait Balzac. Qui voudrait rater la réapparition d'Isidore Ducasse, meuglant "I feel alright" sur fond de larsens, de batterie déchaînée et de guitares saturées ? C'est un peu ça, Les Chants de Maldoror : se soulager en hurlant "Je me sens bien" quand justement on ne se sent pas bien du tout. On a envie de partager les mythes de Christian Edziré Desquesnes, qui sont aussi un peu les nôtres. Et on n'oublie pas que la poésie doit être faite "par tous les sens". Rendez-vous avec Passages pour de nouvelles rencontres furieuses entre énergie et poésie.

  • Christian Edziré Desquesnes - 15 rue du Général Delestraint - 59230 Saint Amand les Eaux (abonnement : 25 € pour un an).
 
Le Coudrier : éditer en Wallonie
EN 2001, JOËLLE AUBEVERT LANCE LES EDITIONS LE COUDRIER avec toute son énergie et de modestes moyens. Aujourd'hui, sa collection est riche de dix-huit volumes, dont deux recueils collectifs, Ces Créatures semi-nocturnes, paru en 2003, et Photomancies, présenté lors d'une lecture à Bruxelles le 10 décembre dernier. Petite revue des dernières parutions :
Photomancies (recueil collectif) : Pour les cinq ans des éditions Le Coudrier, Joëlle Aubevert a invité vingt trois poètes à participer à ce projet : "J'aimerais savoir à quoi vous ressembliez avant que je vous connaisse." L'idée était de partir de photos des auteurs à l'âge de cinq ans, en demandant à d'autres d'écrire un petit texte à partir de ces photos. Le pari était un peu risqué. Le résultat est une belle réussite, un recueil vraiment étonnant, inhabituel, que l'on parcourt avec l'impression étrange de feuilleter un album d'enfance où il serait exclu de faire directement appel au souvenir. Certaines intuitions pourtant - écrites par des inconnus sur des photos anonymes - sont saisissantes. La photo d'enfance qu'on croyait avoir délavé du regard prend de nouvelles couleurs. On découvre le visage qu'avaient les amis avant qu'on les connaisse. La photomancie apparaît alors comme un exercice de divination qui tombe parfois à côté, mais peut aussi toucher juste, révélant ainsi ce qui restait caché dans l'évidence de la photo. L'ensemble du montage textes/images produit cet indémêlable mélange de rêveries, de fables, de souvenirs, de réflexions et d'inventions que nous aimons dans la littérature.

 

Djamal BENMERAD : Abrasion Journaliste algérien exilé en Belgique après avoir cru perdre son fils dans un enlèvement, Djamal Benmerad n'a pas vraiment trouvé la quiétude sous les cieux du Septentrion. Sa poésie est celle de l'exil, de la douleur du monde, et c'est pourtant le chant d'espoir d'un destin ravagé.
 

Michel DECOBU : L'Ile élue (Dessins de Jean-Marie GOFFIN) L'île élue, c'est le sexe de la femme aimée, dessiné avec une précision photographique par Jean-Marie Goffin. Hyperréalisme et poésie célèbrent ici leurs noces sans aucune pudeur. Les quatrains dispersés au fil des pages ont l'air de petites culottes noires abandonnées sur le plancher de la chambre où la belle s'ouvre aux désirs de l'amant-voyeur.

PHIL FAX
 
 
Création-Récréation - octobre 2006