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Sur la rive gauche de cette écluse capitale
de notre vie, il y avait une petite vigne retournée à létat
sauvage, une jonchée dordures diverses et une vieille
valise pleine de sentiments dépareillés. Si lon voulait
se désaltérer ou acheter des cigarettes, il fallait retourner
au village. Encore fallait-il en retrouver le chemin, cette
vipère écrasée nétait pas là tout à lheure, et quid
du temple anglican dont on na plus que le pointillé dans
la cervelle ? On en était à souhaiter une rotation supplémentaire
de la terre quand arrivait une péniche transformée en petit
paquebot de luxe dont le capitaine demandait quon lui
ouvrît la vanne. De là à penser à LEducation sentimentale
et au coche deau qui emmenait ses héros à Nogent sur Seine,
il ny avait quun pas, suffisant pour voir
mais sur lautre rive ! réapparaître le temple
et pour mettre le pied juste à côté dune vipère bien vivante.
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Que dimprévus si lon
suivait le bateau par lancien chemin de halage en escaladant
les ronces. Cet imbécile de Frédéric troussait madame Arnoux
dans le dos de son mari et il y avait grand ram-dam à bord.
Des noisetiers nous donnaient un peu dombre mais il fallait
piétiner dans la fange et lon priait, tout au fond de
soi-même, pour que fût tondue, sinon décapitée, la stupide coiffeuse
venue sinstaller dans ce désert.
Le détour considérable que lon
dut faire à pied pour passer sur la rive droite fut épuisant
et sans récompense. Péniches embourbées, casses dautomobiles,
perte de vue du temple qui avait croyait-on franchi le fleuve,
glapissements de signes qui sen prenaient à nos chaussures,
rencontre dun garde-chasse en uniforme vert quon
pouvait, de loin, prendre pour un feld-gendarme oublié par larmée
allemande en déroute et surtout, surtout honte de soi, ennui
de vivre. On navait quune envie, fuir et on le fit
dès que lon atteignit les marges du poème en prose du
jour.
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