En
couverture du Journal d'un lecteur, un homme est
allongé tout habillé dans sa baignoire avec
des livres autour de lui. Une main sur la joue, il lit
ou fait semblant pour la photo. Cet homme, c'est Alberto
Manguel, écrivain argentin de nationalité
canadienne désormais installé dans le Poitevin,
où il a enfin pu loger sa bibliothèque cosmopolite
dans une ancienne grange aménagée. Homme
du livre, Alberto Manguel est tombé dedans quand
il était petit. Dans Chez Borgès
il conte comment, adolescent, il fut amené à
faire la lecture à haute voix pour l'auteur de
La bibliothèque de Babel devenu aveugle.
Son Histoire de la lecture est déjà
presque un classique (par une curieuse coquille, c'est
une Histoire de la culture qui est mentionnée
dans sa bibliographie, en tête de l'ouvrage). Initialement
paru chez Actes Sud en 2004 ce Journal d'un lecteur
prend pour prétexte la relecture de douze livres
sur douze mois (juin 2002-mai 2003) pour évoquer
en douze chapitres, avec la liberté du journal
intime, les rapports entre la lecture, la pensée
et la vie. Pour Manguel, la lecture est une conversation
où le lecteur est aussi actif que l'auteur. C'est
lui qui redonne vie aux pensées, aux émotions,
enfermées dans les pages des livres. Ses conversations
avec Bioy Casares, Wells, Kipling, Conan Doyle, Chateaubriand,
Goethe, Cervantès, Dino Buzzati ou Joaquim Maria
Machado de Assis sont pleines de surprises, de rapprochements
et d'associations qui invitent ses lecteurs à s'aventurer
eux-mêmes dans cet univers où nous avons
toujours l'impression d'en être encore " au
début de la lettre A ". C'est un plaisir de
parcourir le labyrinthe de la bibliothèque universelle
avec un tel guide. Et une belle stimulation pour y poursuivre
son propre parcours, en utilisant à son gré
les repères marqués par son crayon.