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Ce numéro
de printemps-été-automne couvre à
peu près toutes les saisons de l'année 2011.
Une seule excuse pour ce retard : je n'ai pas oublié
de vivre. J'ai rêvé. J'ai privilégié
la création de collages, qui reste pour moi un
pur bonheur. J'ai passé un peu de temps à
préparer un livre qui devrait paraître au
début de l'année 2012 aux éditions
de l'Usine. Je me suis laissé guider par mes désirs
et mes curiosités. J'ai poursuivi ma quête
de rencontres humaines, de découvertes intellectuelles
et spirituelles, d'art modeste, de fétiches et
de poupées, de livres et d'images. Ainsi, dans
le prolongement de la belle exposition consacrée
à Grandville par le Musée Rops de Namur
l'été dernier, j'ai trouvé à
Lille un exemplaire d'un des derniers livres qu'il a illustrés,
Jérôme Paturot à la recherche d'une
position sociale de Louis Reybaud (auteur des études
sur les réformateurs ou socialistes modernes) édité
à Paris en 1846. Sa reliure romantique est ornée
d'une devise gravée en lettres d'or, contre laquelle
je n'ai rien à objecter : Je n'en fais qu'à
ma tête.
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Chaque
numéro de la Nouvelle
Revue Moderne est
le produit d'une alchimie que je ne maîtrise pas entièrement.
Ce que je cherche au fond, c'est l'Or du Merveilleux. Les choses
parfois doivent prendre le temps d'émerger. Sous le titre
de Géographies mentales, ce numéro réunit
des contributions individuelles sollicitées par moi ou
parvenues jusqu'à moi au terme d'un cheminement parfois
obscur. Des textes, des images, surgissent de configurations
mentales singulières. Nous sommes dans l'espace du
dedans.
Patricia
Prince ouvre ce numéro avec trois encres qui
figurent en couverture. Pat nous a tous bluffés en passant
sans prévenir du collage au dessin, des dessins habités
comme on peut en juger. Elle est aussi poète et a publié
en octobre un recueil illustré où l'on peut découvrir
d'autres uvres en couleur tout aussi fascinantes.
David
Van Robays, également
colleur, ne peut s'empêcher de donner au langage un traitement
qui donne vie aux créatures qui en surgissent.
Certains les appellent animots. Les poèmes d'Avalé
Chapman s'intéressent à présent au cheptel
humain et c'est encore plus drôle, car le rire est
le propre de l'homme, n'est-ce pas ? La suite de l'uvre
poétique d'Avalé Chapman est annoncée dans
la revue Niveau 8, à paraître.
Charles
Pennequin m'a proposé ce "roi" d'excellente
lignée. Il est illustré d'un dessin de Christoph
Bruneel, et d'un "work in progress", élaboré
avec Reivax (François-Xavier
Delmeire) dans le cadre d'un projet de "cadavres exquis"
en collages auxquels nous travaillons à trois.
Annie
Wallois,
qui contribue à la NRM depuis son
n°1, a publié en 2011 Nuit rebroussée
aux éditions Henry de Montreuil-sur-mer. "Cartographie"
est un de ces fragments d'enfance en Pas-de-Calais.
Jean-Noël
Potte, qui régla jadis de subtiles "horlogeries"
poétiques, poursuit discrètement son uvre
de graphiste et d'écrivain. "Le paysage" fut
écrit en 2007, à l'occasion d'une exposition qui
nous réunit à la galerie La
Petite Renarde rusée à Lompret. "Tout
d'abord, tout d'abord invisible sous l'insondable profondeur
du ciel et comme naturellement cerné d'un horizon sonore,
batteuses au loin et coqs à peine plus proches, chaleur
et rosée
" Comment ne pas être sensible
à cette prose qui lie paysage et intériorité
?
Un
poème d'Hafsa Saifi,
élève-ingénieure à l'université
d'Alger qui m'a contacté après avoir été
charmée par une phrase de Richard Brautigan lue sur le
site de la NRM,
évoque un autre paysage, celui de l'Atlas où les
berbères sont installés depuis des siècles.
En quelques mots, tout est dit : l'isolement, l'angoisse, l'amour
qui relie les êtres prisonniers d'une "tache d'ombre"
Je
ne connais pas personnellement Hervé
Merlot, mais ses antécédents du côté
de L'Igloo dans la dune et de Microbe ne le déshonorent
pas. Ses "17cm2 de ciel ocre" donnent à voir
une géographie mentale aussi composite qu'un collage.
Poète
et animateur de L'Igloo dans la dune, Guy
Ferdinande évoque un ami disparu dans un texte
où se mêlent le rêve et le souvenir. Je me
suis permis de l'illustrer avec un dessin offert par Jacques
Noël. Beaucoup connaissent la qualité
de l'il de Monsieur "Un Regard Moderne" et savent
que son travail en tant que libraire et découvreur n'a
guère d'équivalent. Son travail d'artiste est
encore plus discret que sa boutique légendaire de la
rue Gît-le-cur. Je n'ai pas cru faire violence,
à l'un ou à l'autre, en rapprochant sa "barque
des morts" du texte de Guy.
La
barque des mots
alors que ce numéro était
sous presse, celle-ci vient d'emporter début décembre
notre ami José Millas-Martin.
Il était un lecteur attentif de la NRM
et m'avait autorisé à extraire de son dernier
livre un texte inédit, "La bibliothèque".
Lui qui fut aussi éditeur, il admet ici avec humour avoir
commencé sur le tard à lire les livres en entier,
"avec un plaisir trouble". La lecture n'est-elle pas
le moyen de vivre plusieurs vies ? J'aimerais que l'on interprète
sa présence dans ce numéro, non seulement comme
un hommage au poète surprenant qu'il était, mais
comme une incitation à cheminer encore un peu en sa compagnie.
Puissent
ces diverses "géographies mentales" vous faire
découvrir quelques paysages insoupçonnés
PHILIPPE
LEMAIRE
phil.fax@free.fr
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